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DE CHARTIER CREATEUR D’HARMONIES

Mort d'Étienne Hugel, 57 ans : «Hommage à un mentor et à un ambassadeur des vins d'Alsace»

Avr 10, 2016

etienne-hugel-1Cher Étienne,
Quelle stupéfaction, doublée d’une très grande tristesse, que d’apprendre au réveil, samedi matin (le 9 avril 2016), ta disparition subite!
Mes premières pensées vont à ceux que tu laisses dans le deuil; ta femme, tes deux enfants, ton père et tes frères, ainsi que la grande «Famille Hugel», sans oublier tes milliers d’amis et collègues — dont je fais partie depuis presque trente ans — répartis sur les cinq continents que tu foulais régulièrement pour propager ta passion des vins d’Alsace et de leur formidable potentiel harmonique à table avec les cuisines du monde, dont celles d’Asie.
Ton passage éclair — mais si marquant — dans nos vies aura eu un impact beaucoup plus grand que tu pouvais le soupçonner.
Tu ne le savais peut-être pas, mais tu as été un mentor pour moi quant à l’amour et à la compréhension des vins d’Alsace que j’ai rapidement acquise, jeune sommelier au début des années 90.
Ta grande passion et tes incroyables connaissances des harmonies mets et vins d’Alsace, que tu communiquais avec maestria, auront eu un impact majeur dans ma compréhension de l’harmonie vins et mets en général. Je suis si triste d’écrire cela maintenant que tu es parti vers d’autres cieux…
Pourquoi ne te l’ai-je jamais dit? Aujourd’hui, je le regrette sincèrement.
J’ai eu le grand privilège de te recevoir à quelques reprises à mon humble Club de Vins, à Montréal, entre 1992 et 2002, avec mon épouse Carole, afin de présenter les vins de la Famille Hugel aux amateurs et professionnels du Québec, et de créer ensemble des repas inspirés des arômes de ces remarquables crus. Chaque fois, tous tombaient sous le charme de ton attachante personnalité, de ton vif sens de l’humour et de ta communicative passion des vins de la Famille Hugel et de l’Alsace en général.
L’Alsace perd son Ambassadeur numéro un avec un grand A.
Tu voyageais régulièrement vers Montréal avec des vignerons d’autres régions françaises, dont feu Gérard Jaboulet, ton ami. Je me souviens qu’à son décès, à la fin des années 90, avec ta grande générosité, tu avais pris sous ton aile son fils Nicolas, afin de nous le présenter et de l’aider à mieux comprendre le marché québécois que son père avait si formidablement conquis.
Tu étais un mentor aussi pour tant de jeunes vignerons.
Puis, en 2001, tu m’avais invité avec quelques sommeliers de renom, dont ton ami, l’alsacien Serge Dubs, à un repas asiatique, arrosé de vos vins, au restaurant Au Bonheur du Palais, à Bordeaux. Quelle révélation, une fois de plus, lorsque nous avons constaté avec quelle aisance les vins d’Alsace se mariaient avec les cuisines orientales, si souvent difficiles à accorder avec justesse, sans compter que cette soirée avait été des plus délirantes, comme toujours lorsque tu étais à table avec nous!
Je pourrais noircir d’innombrables pages avec des souvenirs impérissables de ta vivacité d’esprit, de ta joie communicative, de ta générosité, de ta capacité d’aller vers l’autre et d’accepter l’autre…
Mais aujourd’hui, tout ça n’est que souvenirs, car tu ne seras plus là pour nous faire avancer, pour nous faire sourire, et même rire a chaudes larmes, à s’en décrocher les zygomatiques… Mais, nous tâcherons tant bien que mal de poursuivre ton œuvre, tu n’as pas à t’inquiéter.
Le sommelier « créateur d’harmonies » et négociant-éleveur en vins que je suis devenu au fil des ans te salue, et surtout, te remercie mille fois d’avoir partagé cette passion, cette vérité alsacienne qui t’habitait, et qui m’habite maintenant, comme tant d’autres sommeliers et amateurs de vins d’Alsace.
Encore une fois, mes sincères condoléances à ta famille et à tes proches.
Puisses-tu avoir trouvé la paix.
Requiescat in pace, cher Étienne.
François CHARTIER